Maître Sonia Harvey

Avocate en droit de la jeunesse
Centre communautaire juridique de Montréal

Bonjour. Je suis Me Sonia Harvey, avocate à l’aide juridique depuis maintenant 17 ans. J’ai commencé ma carrière à la Chambre criminelle et pénale, et je travaille en droit de la jeunesse au Bureau d’aide juridique depuis 12 ans. Mon rôle comme avocate à la Chambre de la jeunesse est assez différent de celui d’un avocat en droit criminel auprès des adultes. Pour ces derniers, on concentre la peine sur la dissuasion. On assiste souvent à une gradation des peines au gré des récidives, ce qui me laisse parfois l’impression qu’on punit, mais que ça ne change pas grand-chose pour les adultes qui commettent des délits. Certains d’entre eux sont malheureusement pris dans un engrenage judiciaire sans fin.

À la Chambre de la jeunesse, en vertu de la LSJPA, le principe est la réhabilitation et la réinsertion sociale, et tous les interlocuteurs sociaux et judiciaires tentent de trouver des solutions personnalisées pour éviter toute récidive. Je trouve mon travail auprès des jeunes plus valorisant, parce que j’ai l’impression qu’en agissant avec eux en amont, on peut avoir un impact sur leur parcours et influencer la suite des choses pour eux.

Les valeurs de réinsertion et de réhabilitation prônées par la LSJPA sont portées par l’ensemble des acteurs de la Chambre de la jeunesse. Nous travaillons moins dans un mode de fonctionnement contradictoire que dans un esprit de collaboration, afin de trouver des solutions adaptées à chaque jeune. Même avec un mandat différent – car, bien sûr, le travail d’un avocat de la défense demeure tout de même de défendre au mieux les intérêts d’un jeune –, notre focus est le même : faire en sorte que la réhabilitation fasse son œuvre et éviter toute récidive.

Comme avocate, je suis dans une position privilégiée pour observer ce qui est essentiel pour le succès de l’intervention. Je constate que la relation qui se crée entre un délégué et un adolescent a un effet significatif. Peu importe le degré d’engagement d’un jeune dans la délinquance, s’il se sent respecté, s’il sent qu’il peut faire confiance au délégué, même si celui-ci est ferme, il sera réceptif à l’intervention, ce qui pourra influencer ses choix. J’ai vu des jeunes dont la relation avec leur délégué ou avec leur éducateur a déterminé leurs choix de carrière ou de vie.

Je pense aussi que dans l’application de la LSJPA, on accorde de plus en plus de place à la victime. À la Chambre de la jeunesse, la Charte des victimes est bien appliquée. On s’assure qu’elles sont contactées et que leur point de vue est pris en compte. Les mesures en lien avec les victimes, surtout la médiation, sont envisagées chaque fois que c’est possible, notamment lors de la mise en œuvre de mesures extrajudiciaires. D’après mon expérience, les jeunes aiment s’expliquer avec les victimes et sont touchés lorsqu’ils les entendent parler des conséquences qu’elles ont subies. Souvent, ils ne réfléchissent pas à l’impact de leur geste lorsqu’ils commettent un délit, mais pour la plupart, le contact avec la victime les amène à réaliser les torts causés, ce qui a sur eux un effet certain.